Deux grandes grèves entrées dans l'histoire par André Moine (suite et fin)...

Publié le par adolphine

Leçons d'une grande grève typique (suite)



Pour comprendre ces attitudes, il importe de les situer dans le contexte politique de l'époque, dans le climat social et dans la stratégie révolutionnaire du moment.
On croit à la révolution possible et proche. Dans les Cahiers du Bolchévisme d'août 1930, J. Raveau tire les leçons de la grève et on peut lire : "Si la grève de Boucau s'était répétée identiquement sur des centaines de points du territoire, le pouvoir eut été impuissant à briser le bloc ouvrier-paysan".

Dans ce contexte il ne faut pas s'étonner si un dirigeant de la grève, Maurice Perse, maire de Boucau, militant pondéré, peut tracer l'orientation du mouvement : "On s'est trompé en 1920 en assurant la sécurité de l'usine; quand on fait grève ce n'est pas une question de sentiment, c'est la guerre de classe. Il faut frapper fort et rapidement l'adversaire. Il ne faut pas craindre de faire crever une usine qui fait crever les ouvriers toute l'année".

Ce n'est pas du désespoir, mais un sentiment révolutionnaire exacerbé, qui sera une faiblesse, mais aussi et en même temps, une grande force des forgerons.

Cette grève est typique de l'état d'esprit révolutionnaire de l'avant-garde de l'époque, d'une combativité sans limite qui anime les ouvriers des Forges, les projette sur le devant de la scène régionale et nationale et leur donne une autorité méritée. Typique aussi par les erreurs et les illusions, la stratégie "gauchiste" du mouvement communiste de cette période.

Une autre chose remarquable doit être notée : comme en 1920, la grève n'aboutit à aucun résultat matériel et la répression décapite le mouvement aux forges. Cependant, l'autorité des dirigeants communistes sort renforcée de l'épreuve; dès 1935, ils sont réélus à la tête des municipalités.
D'autre part, aujourd'hui, ceux qui ont vécu l'évènement ne le perçoivent pas du tout comme un échec, mais comme un acquis du mouvement ouvrier, une expérience qui a porté ses fruits, une page glorieuse dans laquelle se sont affirmés la personnalité et la dignité des ouvriers. C'est cela que le combat a inscrit dans la mémoire collective des travailleurs. A juste titre.

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